Le Lean Six Sigma : une méthode d’amélioration de la qualité des produits… pas des services ?

Le Lean Six Sigma : une méthode d’amélioration de la qualité des produits… pas des services ?
Publié le Mardi 8 janvier 2019

Sylvie Gallo
Consultante Senior, Master Black Belt

Pour toute démarche d’amélioration de la qualité des processus, le Lean Six Sigma est la démarche qui permet d’apporter des solutions durables. Si elle a été tout d’abord mise en place dans le domaine manufacturier, il serait néanmoins dommage de la limiter à ce seul périmètre.  

Principes du Lean Six Sigma

Le Lean Six Sigma est avant tout un état d’esprit :

  • Abandonner les idées fixes, refuser l’état actuel des choses (remise en cause permanente)
  • Au lieu de dire ce qu’on ne peut pas faire, réfléchir à comment faire
  • On ne peut améliorer que ce que l’on mesure
  • Les difficultés et contraintes sont sources de progrès
  • Chercher la cause réelle (et non les symptômes) et déterminer ensuite les solutions
  • L’ idée de 10 personnes vaut mieux que l’idée géniale d’une seule
  • Démontrer l’efficacité des solutions par l’analyse factuelle des données
  • L’amélioration est infinie, il n’y a pas de limite.

Le Lean et le Six Sigma sont aussi caractérisés par une philosophie. L’entreprise cherche à la fois à maximiser la satisfaction du Client, tout en diminuant les coûts liés aux dysfonctionnements (gaspillages, non-qualité), par le biais d’une démarche analytique objective des processus[1]. Le Lean vise à produire ce qui est nécessaire, au moment utile, avec les ressources appropriées et en réponse à la demande du client. Le Six Sigma, au travers d’une démarche rigoureuse en cinq étapes, le DMAIC, permet également d’améliorer durablement la qualité d’un processus en déterminant ses causes profondes de variation, avant de rechercher des solutions.

Enfin, le Lean Six Sigma met à disposition des groupes de travail des outils pour résoudre les problèmes. Six Sigma est une approche mathématique et statistique : elle part de l’analyse objective des besoins du Client et vise à réduire les erreurs au sein d’une entreprise (le niveau Six Sigma visant la qualité totale avec seulement 3,4 défauts par million d’opportunités[2]). Les statistiques descriptives et inférentielles permettent de caractériser le processus et de valider les causes réellement influentes sur le processus ; les plans d’expérience permettent d’optimiser les facteurs impactant le processus. Quant au Lean, c’est une approche comportementale globale, favorisant la participation des individus, quel que soit leur niveau hiérarchique, afin d’optimiser les performances de l’entreprise. Là aussi, il s’agit d’analyser les données, mais dans ce cas, pour améliorer et lisser les flux de production au sein de l’entreprise.  

Le Lean Six Sigma pour améliorer les processus industriels

D’abord développées dans les milieux industriels pour gérer les productions en grande série (Toyota pour le Lean, Motorola pour le Six Sigma), ces deux méthodes, tout d’abord opposées, ont ensuite naturellement convergé pour former le Lean Six Sigma. Pourquoi ces méthodes ont-elles d’abord été déployées dans le milieu manufacturier ?

Dans ces secteurs, les processus sont visibles : chaque machine décrit une transformation, et l’on voit clairement les étapes du processus et la matière évoluer. Il est facile de visualiser les pièces produites (la valeur ajoutée) et les gaspillages (rebuts, attentes, stocks, transports, etc…). La production en grande série a également créé l’urgence de s’intéresser à ces processus, les défauts de chaque jour ayant des conséquences financières importantes et dangereuses pour la prospérité des sociétés.  

Le Lean Six Sigma seulement pour les productions de grande série ?

A bien y réfléchir, le Lean Six Sigma ayant pour objectif d’augmenter la satisfaction du Client en réduisant les coûts de fonctionnement, cette démarche peut s’appliquer à n’importe quelle taille d’entreprise, à partir du moment où des étapes répétitives ont lieu, et où des mesures sont effectuées pour suivre la performance des processus (indicateurs-clés pour garantir la satisfaction du client). Dès lors que ces indicateurs montrent un niveau insuffisant et/ou une variabilité importante, il y a matière à amélioration et la démarche fait tout son sens.  

Le Lean Six Sigma seulement pour les processus industriels ?

Avec la même logique, c’est tout naturellement que les entreprises ayant mis en place la démarche Lean Six Sigma se sont intéressées à leurs services support, et on voit de plus en plus de projets Lean Six Sigma se déployer dans les départements administratifs des compagnies industrielles.

Les organisations du secteur tertiaire, que ce soient les entreprises du secteur bancaire, les administrations publiques, les organismes de santé ou autres, ont des intérêts globalement peu différents des secteurs industriels : là aussi il est impératif de respecter la voix du client, et les Services sont soumis aux mêmes impératifs de qualité, de délai et de rentabilité pour garantir leur prospérité. D’ailleurs, la norme ISO 9004:2018 « Management de la qualité -- Qualité d'un organisme -- Lignes directrices pour obtenir des performances durables » s'applique à tout organisme, « quels que soient sa taille, son type et son activité ». Ses lignes directrices sont cohérentes avec les principes de management de la qualité énoncés dans l'ISO 9000:2015. Les processus des organisations du tertiaire sont, en tout cas dans les grandes lignes, peu différents des processus des industries de production. Là aussi, des étapes répétitives ont lieu tous les jours. La difficulté vient du fait que les processus sont moins visibles, et que la notion de spécifications -et donc de taux de déchets- est peu présente.  

La définition des indicateurs et leur suivi n’est pas toujours une priorité, mis à part le respect de la date promise au client. Une multitude de tâches s’ajoute aux responsabilités initiales, et l’absence d’indicateur rend ces surcharges invisibles, hormis le sentiment d’irritation et d’inefficacité qui va en augmentant. La (re?)mise à plat des processus transfonctionnels va alors mettre en perspective les tâches réalisées par rapport aux services attendus, et faire réfléchir aux réelles attentes du client (issues d’enquêtes de satisfaction, retours SAV,  benchmarking, etc…). L’analyse plus fine des indicateurs (souvent des délais) grâce aux statistiques va permettre des identifications de causes racines à côté desquelles on passe généralement par l’habituelle comparaison de moyennes.

C’est ainsi que la connaissance d’outils statistiques dédiés (outils pour données non Normales) associée aux techniques du Lean pour la fluidification des processus permet aux entreprises du tertiaire de gagner en compétitivité.

Si vous souhaitez en savoir davantage sur la méthode Lean Six Sigma, vous pouvez visionner le replay de la web-conférence animée par Jean-Louis Théron.

[1] Ensemble d’étapes répétitives amenant une matière ou information de son état initial à l’état final désiré par le client

[2] Une opportunité est un défaut potentiellement présent


Sylvie Gallo
Consultante Senior, Master Black Belt

Autres articles