Comment convaincre les "data-sceptiques" à l'analyse de données

Comment convaincre les "data-sceptiques" à l'analyse de données
Publié le Mercredi 3 février 2016

Jean-Louis Théron
Master Black Belt

L’emploi du Lean 6 Sigma pour améliorer un processus nécessite de collecter et d’analyser des données. La méthode s’applique donc aux situations où les données immédiatement disponibles n’ont pas permis – ou ne permettraient manifestement pas – d’améliorer le processus par des méthodes de résolution de problème.

Ceci dit, même une fois reconnu cette nécessité de collecter des données, il peut rester des « data-sceptiques » au sein de l’organisation. Voici leurs principaux arguments… et ce qu’il est possible de leur répondre.  

  1. Nous sommes les experts du processus, nous avons tous les jours « le nez dessus », et personne ne va nous apprendre comment il fonctionne ! La connaissance des acteurs du processus n’est jamais à négliger, mais elle est souvent superficielle. La mémoire des événements importants du processus est sélective : on retient plus une « crise » ponctuelle qu’une dérive lente et insidieuse. Chacun met en œuvre sa propre expérience, fondée sur des problèmes qui l’ont marqué et qu’il veut à tout prix éviter… mais le problème n’est peut-être pas là. Comme dit un proverbe anglais : « Si vous avez un marteau, chaque problème est un clou ». Pour sortir des marottes de chacun, rien ne vaut un recueil objectif de données, et une analyse rigoureuse de ces données, sans parti pris.
  2. Nous avons des standards et des procédures (ISO 9001, en plus !). Chacun applique « plus ou moins » les standards, mais sans savoir pourquoi, c’est-à-dire sans connaître de manière quantifiée les conséquences d’un écart par rapport au standard. De ce fait, on assiste fréquemment à des pratiques superstitieuses : « Ne changeons rien, sinon, on ne sait pas ce qui peut arriver ! ». Ceci n’est pas une attitude qui favorise l’amélioration du processus.
  3. Nous connaissons et utilisons les facteurs influents (sources de variation) du processus. Oui… par la connaissance commune et intuitive, la formation professionnelle métier. Mais cette « connaissance » est-elle un ensemble d’opinions, de croyances, ou est-elle étayée par des faits mesurables et mesurés ? L’objet du Lean 6 Sigma est précisément de passer des opinions aux faits. La matrice de priorisation établie en phase Définir exprime ces opinions. Lors de l’analyse, les hypothèses d’influence qu’elle contient sont confirmées ou infirmées, et l’influence est quantifiée. Et il y a souvent des surprises…
  4. Nous pouvons affirmer que, suite à nos chantiers, le processus s’est amélioré ! Ah oui ? Et sur quelle base ? La moyenne du KPI a changé… mais la médiane n’aurait-elle pas été un meilleur indicateur ? Quelle est la taille de l’échantillon utilisé pour conclure à une différence ? En d’autres termes, les statistiques confirment-elles l’intuition de l’amélioration (ou le début d’une amélioration effective) ?
  5. Le processus a été amélioré, un standard a été mis en place, tout va bien… passons à autre chose ! Quels sont les moyens de supervision que le pilote du processus utilise pour s’assurer de la pérennité des résultats obtenus ? Bien souvent, l’expérience montre que les pilotes de processus naviguent à vue, avec des indicateurs portant plus souvent sur le passé (mesures récentes) que sur la prédiction des non-conformités possibles. Une bonne carte de contrôle d’un facteur influent permettrait cette anticipation…

Améliorer un processus ne s’improvise pas. Trop d’entreprises laissent un peu tout le monde « tourner les boutons de réglage », et s’étonnent ensuite de l’instabilité des résultats. Passons donc à une connaissance plus scientifique des processus : poser des hypothèses, recueillir des données, confirmer ou infirmer les hypothèses. C’est l’objet même du Lean 6 Sigma.  

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Jean-Louis Théron
Master Black Belt

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