La clé de voûte d'une démarche d'Excellence Opérationnelle : Le développement des compétences

La clé de voûte d'une démarche d'Excellence Opérationnelle : Le développement des compétences
Publié le Mardi 5 juin 2018

Corinne Oudot
Global Lean Manager

Comment accompagner chaque collaborateur pour qu'il progresse et développe les compétences clés ?  Quelles sont ces compétences ? Vos collaborateurs les ont-ils déjà ? Pourquoi ne les expriment-ils pas dans ce cas ?

Le Lean demande aux hommes et aux femmes au travail plusieurs aptitudes spécifiques

D'abord, une position de "vérificateur de fait" : Tous les dysfonctionnements, réels ou présumés, doivent être ramenés à des données, des mesures. Sinon il s'agit d'opinions, ce qui est la garantie de débats conflictuels et stériles.  En ce cas, l'outil Lean, c’est bien sûr, le QQOQCPC. La compétence c'est le courage et le réalisme de la mesure, puis, la confrontation des impressions et perceptions avec la réalité.

Ensuite, une orientation client et flux de valeur ajoutée : Dans chacune des activités, dans chaque choix d'emploi de ressources, il faut toujours penser au client final, à son besoin et au rythme de ce besoin. Là, deux outils sont en jeu : Le Takt Time et la compréhension du flux de valeur dans l'entreprise. Les compétences requises sont le réalisme (par rapport aux capacités à produire), la retenue (produire le juste nécessaire) et la ténacité (pour conduire chaque tâche à son terme).

Enfin, il faut pouvoir résoudre les problèmes en groupe, c'est-à-dire être capable de poser des questions pour rechercher les causes racine, de proposer ses idées et solutions, accepter qu'elles soient reçues ou non, et plus encore, être capable d'écouter les idées des autres, les recevoir et les élaborer sans se les approprier. Les outils sont : Les méthodes de résolution de problème en groupe (pour avoir la démarche systématique de recherche de causes racine), les rituels d'animation (pour partager les informations aussi quotidiennes qu’importantes de façon habituelle) et les plans d'actions (pour garder la priorité des tâches importantes). La compétence, c'est alors de savoir jouer collectif, de savoir écouter et de savoir partager.

Cela étant posé, comment faire éclore ces compétences ? Pourquoi ne s’expriment-elles pas spontanément ?

Comment cette situation s’est-elle créée ? Comment perd-on le contact avec le besoin du client ?

Les organisations grandissent pour répondre aux besoins des clients, et au-delà de 7 à 10 collaborateurs (une table de restaurant en principe) il se forme des branches. Chaque branche s’autonomise de plus en plus, et la notion d’ensemble se perd. Chacun se retrouve à essayer de remplir sa fonction, sans bien savoir en quoi elle sert le client final. On travaille donc pour celui ou celle dont dépend notre reconnaissance sociale, celui qui va nous féliciter ou nous augmenter (ou seulement ne pas trop nous blâmer selon les cultures d’entreprises). On travaille aussi pour que son groupe de collègues soit content et nous garde comme « un des siens ». On va donc naturellement soutenir des solutions qui ont déjà payé, sans vérifier s’il s’agit du même problème, ni pourquoi le problème revient, même si la solution a fonctionné, On va privilégier les solutions défensives, qui traitent le problème qui est posé au groupe local plutôt qu’à l’ensemble, car cela serait « une trahison ».

Et on va obéir à l’autorité telle qu’elle est structurée dans le groupe, par habitude et sans remise en cause pour éviter les conflits.

Comment changer ?

Pour changer ces façons de faire, et faire fleurir les compétences clés du Lean, il faut donc créer les conditions antagonistes de cette situation. Il faut rendre ces compétences de rationalisation, de remise en cause et de transversalité, utiles et profitables aux individus.

Une personne qui signale de façon factuelle un dysfonctionnement doit être remerciée – mais sans être singularisée.

Une équipe qui résout un problème de façon transversale doit être félicitée – et le côté « inter-branche » souligné.

Les rituels d’animation, les réunions du matin, les prises de poste, les passages de consigne, les réunions d’équipe, les CoPil, les ComEX, les Top, les Flash meeting, quels que soient leurs noms, doivent être des structures exemplaires de l’efficacité factuelle et tranquille du Lean.  Il s’agit donc d’un partage structuré de données factuelles, avec ajustements mutuels pour répartir les moyens de chacun au service « juste à temps » du client.

Chaque problème – c'est-à-dire l’écart entre ce qu’on a et ce qu’on devrait avoir – nécessite une recherche partagée et rapide de cause racine, une ou des actions avec date et niveau de priorité, un acteur et des ressources. Et chaque jour nécessite une vérification de l’avancée, ainsi qu’un renfort ou re-planification si besoin.

En pratique :

La transition vers le Lean repose toujours sur une combinaison de Kaizen, de workshop et de mise en place de rituels.

Chacune de ces actions doit permettre de se former aux nouveaux outils et surtout de reprogrammer les attitudes des uns par rapport aux autres.

  • Il faut donc faire attention à « faire tourner » les participants, pour coacher le maximum de gens.
  • Il ne faut pas faire l’impasse sur les restitutions publiques en fin de Kaizen, car elles sont l’occasion pour les collaborateurs de concrétiser leur nouveau savoir-être.
  • Il faut coacher sur le terrain, notamment pendant les conduites des rituels, qui sont des moments collectifs.

Les premiers qui doivent faire la preuve et l’exemple de l’attitude Lean sont les responsables et les managers. C’est eux qui vont créer le nouveau « style », la nouvelle culture d’entreprise. Ce sont aussi les seuls qui soient dans une position d’autorité suffisante pour faire évoluer « les baronnies » et montrer l’importance réelle que l’entreprise  accorde à la transition.

Les compétences clés doivent être soulignées lors des entretiens annuels, d’abord comme compétences nécessaires au poste, puis éventuellement en les valorisant par exemple : Nombre de problèmes signalés, nombre d’ateliers de résolution de problèmes, présence et assiduité aux rituels etc.

Faut-il envoyer les personnes en formation ?  

  • Souvent non. La participation active aux Kaizen, et des rituels biens coachés permettent de voir s’épanouir des aptitudes naturelles, pour peu qu’on les valorise activement.
  • Parfois oui. C’est l’occasion de s’ouvrir à d’autres savoirs et de découvrir des outils. Le mieux étant d’y envoyer plusieurs membres d’une équipe, ensemble ou successivement. Et de faire une restitution/mise en œuvre lors du retour de formation.
  • C’est indispensable pour certains managers qui doivent analyser leurs façons personnelles de communiquer et de travailler, et comment les faire évoluer. Ces formations doivent nécessairement être accompagnées de coaching terrain, ou de suivi de projet.

Et pour conclure :

Rappelez-vous qu’il faut plus de courage pour changer de point de vue que pour lui rester fidèle …

et que la réussite est sa propre récompense, chaque jour.

Pour aller plus loin, visionnez le replay de la web-conférence sur le thème de la "Démarche Excellence Opérationnelle Groupe".


Corinne Oudot
Global Lean Manager

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